Oratoire du cimetière
cl. P. Virion
En 1895, après de nombreuses tergiversations, le conseil municipal de Plougasnou, décida de déplacer le cimetière à l’endroit qu’il occupe aujourd’hui. Il y fit suivre deux constructions qui faisaient partie alors de l’enclos, la croix-chaire à prêcher et l’oratoire fondée par la confrérie du Sacre avant le 15 mai 1572, date à laquelle on y célébrait la grande messe du jour de l’Ascension.
Doit-on faire revenir ces deux éléments près de l’église pour reconstituer une partie du placître ancien ? Les avis sont partagés. Notons que les ossuaires et autres calvaires des célèbres enclos du Haut-Léon ou de Plougonven sont restés en place lors du transfert du cimetière. Le choix dépend de l’aménagement de la place du bourg et du statut que la population veut lui donner.
Dès la fin du XIIIe
siècle, des confréries eucharistiques sont signalées en France, en Italie et
aux Pays-Bas. La bulle « Dominus noster Jesus Christus » du pape Paul
III (1534-1549) va servir de charte à une archiconfrérie du Saint-Sacrement,
ayant son siège à Rome dans l’église Sainte-Marie de la Minerve.
Les confréries du Sacre sont créées pour que le Saint-Sacrement soit conservé de manière décente dans les églises et qu’il soit porté avec révérence dans les processions. Le culte public est réglementé avec des instructions précises telles que :
- le nombre de flambeaux qu’il faut allumer près de l’autel du Saint-Sacrement ou dans les processions,
- l’obligation de faire sonner les cloches lorsque l’on porte le Saint Viatique aux malades afin que les membres de la confrérie soient avertis et puissent l’accompagner.
La répartition des confréries est très variée. Elles sont présentes dans 5% des paroisses du diocèse de Nantes, 19% dans celles du diocèse de Rennes et elles atteignent 68% dans celles du Trégor.
Source : Marie-Hélène Froesche-Chopard, De la confrérie du Saint-Sacrement au culte du Sacré-Cœur – Province historique, fascicule 156, 1989.
Le 18 novembre 1581, la confrérie du Sacre à Plougasnou et Sain-Jean-du-Doigt, fut instituée à la requête d’Olivier Cadlen, recteur de Plougasnou et scholastique de Tréguier et de Pierre Lagadou, par Christophe de Cheffontaines, archevêque de Césarée. Approuvée en 1582 par Jean-Baptiste Le Gras évêque de Tréguier, des indulgences lui furent indexées. (Mss Clech)
Ci-dessous nous reproduisons un article sur l’Oratoire du Sacre que nous avons fait paraître, avec la contribution d’Yves-Pascal Castel, dans le Courrier du Léon et du Tréguier, le 7 octobre 1989.
Les confréries du Sacre sont créées pour que le Saint-Sacrement soit conservé de manière décente dans les églises et qu’il soit porté avec révérence dans les processions. Le culte public est réglementé avec des instructions précises telles que :
- le nombre de flambeaux qu’il faut allumer près de l’autel du Saint-Sacrement ou dans les processions,
- l’obligation de faire sonner les cloches lorsque l’on porte le Saint Viatique aux malades afin que les membres de la confrérie soient avertis et puissent l’accompagner.
La répartition des confréries est très variée. Elles sont présentes dans 5% des paroisses du diocèse de Nantes, 19% dans celles du diocèse de Rennes et elles atteignent 68% dans celles du Trégor.
Source : Marie-Hélène Froesche-Chopard, De la confrérie du Saint-Sacrement au culte du Sacré-Cœur – Province historique, fascicule 156, 1989.
Le 18 novembre 1581, la confrérie du Sacre à Plougasnou et Sain-Jean-du-Doigt, fut instituée à la requête d’Olivier Cadlen, recteur de Plougasnou et scholastique de Tréguier et de Pierre Lagadou, par Christophe de Cheffontaines, archevêque de Césarée. Approuvée en 1582 par Jean-Baptiste Le Gras évêque de Tréguier, des indulgences lui furent indexées. (Mss Clech)
Ci-dessous nous reproduisons un article sur l’Oratoire du Sacre que nous avons fait paraître, avec la contribution d’Yves-Pascal Castel, dans le Courrier du Léon et du Tréguier, le 7 octobre 1989.
L’Oratoire
du cimetière à Plougasnou, un exercice de style autour de l’arrondi
Une charpente gothique élaborée
Au premier regard, la charpente de l'oratoire attire l'attention de qui s'aventure au cimetière de Plougasnou. Par un hasard, heureux en un sens, la disparition des lambris et de la décoration peinte met en relief la complexité savante et l'ingéniosité des assemblages. Profusion d'arêtiers, de contre-fiches, de faux-entraits et de clés pendantes, expression baroquisante des derniers feux du gothique. La complexité de la charpente est due au fait que la toiture du chevet de l'édifice est à noues multiples ce qui donne un aspect original au chevet semi-circulaire.
Sans pouvoir nommer le maître d’œuvre qui a produit la chapelle, il est bon de noter que les trois gargouilles crachent l'eau des versants rappellent dans leur dessin celles du style Beaumanoir.
Du gothique à la Renaissance
Mais, à passer de la charpente au plan général, et à la modénature (les profils moulurés de la pierre) on voit ici s'estomper le gothique. Et le maître se livre à ce qu'il faut bien appeler un exercice de style, comme si le client ou l'architecte s'était donné comme propos de tout bâtir sur l'arrondi.
Ainsi, se modèle le plan en abside semi-circulaire prolongée par un auvent porté par deux fortes colonnes rondes.
Le vocabulaire constructif, lui-même, c'est-à-dire, le détail de la construction, est issu du cercle.
- Quart-de-rond: profil de la plinthe extérieure, ébrasement des baies, moulure de la crédence.
- Demi-cercle: terminaison verticale des murs, et des contreforts, arc en plein cintre des baies, consoles des statues.
- Cercle: colonnes, aussi bien dans leurs bases et dans leurs corps que dans les chapiteaux.
Il faut remarquer que ces arrondis sont saillants. Le cavet, le double jeu de courbe et de contrecourbe, l'accolade qui rompt et rétablit l'équilibre, ces éléments de l'esthétique chers à ses prédécesseurs jusque vers 1550 sont bannis par le maître de Plougasnou.
On est, en quelque sorte en présence d'un manifeste architectural proclamant les modes nouvelles qui se répandent dans l'architecture.
Concession et repentir
Notons pourtant, pour être honnête, une concession au passé et un repentir.
La concession est cette haute présence de la triade des pignons aigus. Alors que le chevet semi-circulaire de la chapelle Saint-Antoine, à Plouézoc'h se coiffe d'une couverture conique en 1570, de même que celui de l'oratoire de Saint-Jean-du-Doigt, monté en 1577 par l'architecte morlaisien Michel Le Borgne.
Le repentir, certes bien discret, est le sommet carré des contreforts au plan semi-circulaire...
Œuvre charnière
Ainsi la chapelle du Sacre se présente comme une œuvre charnière, à la jonction de deux époques, ce qui en fait l'intérêt.
Relève-t-elle du savoir-faire d'un maître vieillissant au fait des manières anciennes mais montrant sa capacité à se lancer dans du moderne?
Est-ce l'audace mesurée d'un jeune constructeur, désireux de lier le passé auquel il doit sa formation, à l'avenir dont il rêve. Et dans ce cas ce jeune maître reste-t-il soumis à la loi du commanditaire qui ne lui donne pas carte blanche? Ou bien aurait-il eu à composer avec l'art éprouvé d'un charpentier à l'ancienne qui ne voulait pas s'en laisser compter?
Voilà un exercice de réflexion salutaire. Il apporte une pièce au débat séculaire (combat des Anciens et des Modernes qui ne s'achèvera jamais). Un combat, l'oublierait-on, toujours vivace si l'on en croit ce qui se passe aujourd'hui.
Mais ne quittons pas Plougasnou où la conjonction d'un propos esthétique modernisant, et peut-être d'une querelle, permettent de placer la construction de l'Oratoire sur lequel le maître d'œuvre n'a inscrit ni nom ni date, entre 1550 et 1570... Il y a plus de quatre cents ans.
Christian MILLET