Vie de l'association en 2020
Vendredi 7 février à 10h00, à la salle municipale :
La culture macabre dans le Trégor, conférence par Yves Coativy.
La culture macabre se développe en Bretagne à partir de la seconde moitié du XIVe siècle à cause d'un contexte particulièrement difficile : guerre de Succession (1341-1364), peste noire (1348), crise économique. Elle se caractérise par une obsession de la mort et de l'au-delà et s'installe dans les mentalités sur la longue durée. On peut en sentir les traces jusqu'au milieu du XXe siècle. L'exposé, très illustré, était l'occasion de raconter cette histoire :
Au milieu du XIVe siècle, les Bretons ont le sentiment que les quatre cavaliers de l'Apocalypse dévastent la région avec la guerre de Succession (1341-1364), la peste noire (1348), la famine et l'injustice liées aux événements dramatiques du moment. Une culture macabre se met alors en place pour longtemps, marquée par l'obsession de la mort et de l'enfer. En Bretagne, elle prend un relief particulier du fait de pratiques originales comme l'enterrement dans les églises, la présence des ossuaires ou encore l'apparition d'un nouveau personnage, l'Ankou, son chien et sa charrette. Deux danses macabres bien connues symbolisent bien cette époque difficile (Kermaria an Iskuit et Kernascleden). Cet état d'esprit recule sans doute au XVIIIe siècle mais les folkloristes se chargent de le régénérer au XIXe siècle et la Grande Guerre ravive sans doute les souvenirs les plus sombres. Les missions, toujours actives dans la première moitié du XXe siècle, entretiennent cette ambiance. C'est après la Seconde Guerre mondiale que les nouveautés qui affectent toute la société bretonne, laïque comme ecclésiastique, font disparaître cet héritage un peu lourd.
Yves Coativy est professeur d'histoire médiévale à l'université de Brest, membre du CRBC et président de la Société archéologique du Finistère.
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Vendredi 17 janvier à 10h00 : Histoire de l'inauguration du théâtre de Morlaix,
conférence par Corinne Le Noan.
conférence par Corinne Le Noan.
Fêter un nouvel édifice sur deux jours est un évènement atypique sous la 3ème république, en Basse Bretagne, d’autant plus que le samedi n’est pas chômé.
Les organisateurs ont voulu attirer l’attention particulière des parisiens. François Marie Luzel a ainsi fait venir du canton de Plouaret près d’une vingtaine d’ouvriers, artisans, paysans pratiquant le théâtre en breton pour interpréter en huit heures un antique mystère breton nommé : "Sainte Tryphine et le roi Arthur".
Les quatre premières heures sont jouées au "vieux théâtre", pour le saluer une dernière fois avant sa fermeture, devant cinq personnalités de la Comédie Française invitées par Pierre Zaccone. La ville de Morlaix n’avait pas reçu autant de monde d’importance et d’origines sociales si différentes se mêlant en ville depuis Anne de Bretagne.
Jusqu'à aujourd'hui, persiste l'idée que le "vieux théâtre" était de "style élisabéthain et programmait des pièces en langue bretonne et cette dernière représentation aurait été moquée par les journalistes parisiens si recherchés.
Plus d’une quarantaine de commentaires dans la presse de cette fin de 19ème siècle ont été retrouvés en plus de l’article et des gravures parues dans « le Monde illustré », construisant une réalité un peu différente : le théâtre était à l'italienne et profitait de la venue d'artistes de « boulevard ».
L'évocation d'un épisode légendaire de la tradition orale du Trégor a semblé quelque peu anachronique à une partie des spectateurs, principalement parce qu’il fut joué à huit clos dans un espace vieillissant et non en plein air sur plusieurs jours.
La soirée de gala qui a suivi s’est déroulée dans la nouvelle salle, unanimement saluée comme « coquette », aux « tons qui se velouteront avec le temps ».
La soirée a été animée par les cinq artistes de la Comédie Française en «service mondain » qui ont alterné leur jeu avec les comédiens du théâtre de Brest peu évoqué.
Le dimanche a été consacré au banquet offert aux invités de marque et aux élites de l’administration de la ville et à celles, républicaines, des alentours, en l’absence des artistes amateurs bretons qui devaient assurer la 2ème partie du drame et de ceux de Brest qui assuraient une matinée au nouveau théâtre. La distribution de pain aux pauvres et le grand bal ont complété la journée.
La représentation de Sainte Tryphine a eu un succès d’estime et « ne sonne pas le glas » du théâtre breton car aucun des organisateurs ne l’avait déjà vu joué. Il nous reste les textes qui s’apparentent bien au « style élisabéthain ».
Documents : Corinne Le Noan